Trop peu de logements à prix accessible pour les personnes à petit budget : toutes les grandes villes connaissent cette réalité. A partir de ce constat, Marc Olivé coche toutes les cases du lancement de startup disruptive.
La personnalité du porteur de projet
Visionnaire, serial entrepreneur, passionné d'ingéniérie et d'innovation, idéaliste voulant pêle-mêle contrer le changement climatique, concevoir un train sous l'Atlantique, faire accéder toutes les populations à l'eau potable : bref, Marc Olivé pense out of the box, voit des solutions où d'autres ne voient que les problèmes, et veut rendre le monde meilleur. Un futur CEO de licorne.
A l'été 2018, Olivé imagine d'empiler des chambres-cabines, à la façon des hôtels-capsules, mais pour du logement de longue durée. La proposition de valeur ? Une localisation centrale, de grands espaces communs, des services associés (du ménage au coaching), l'espoir d'une vie meilleure à base d'économies au quotidien. Car le prix est imbattable : 215€ par mois, pour à peine plus de trois mètres cubes d'intimité certes, mais tout est relatif.
Vérifier le proof of concept
S'assurer de l'existence d'un marché et de celle de personnes prêtes à payer pour le produit est un prérequis utile au lancement d'une entreprise ; trouver des clients avant de fabriquer le produit, le Graal de tout porteur de projet. A cette aune, Marc Olivé ferait pâlir d'envie plus d'un wanabee startupeur.
Sans argent, sans bureaux, sans entreprise, il couvre Barcelone d'affichettes qui lui amènent, dit-il, nombre de candidats ; et qui attirent l'attention d'un journal local. Les médias nationaux puis internationaux s'emparent du sujet, offrant à Haibu une visibilité quasi planétaire dès l'automne. De quoi envisager une belle scalabilité.
Profiter des opportunités
Olivé se transforme alors en abeille ouvrière, multipliant les interviews tout en lançant son site web (truffé de photos "empruntées" dignes d'Instagram et des annonces AirBnB) et en élaborant un MVP (projet minimum viable) : quelques cabines de mauvais contreplaqué agrémentées d'accessoires Ikea et de quelques échantillons-témoins de "rucheurs" à présenter aux médias. Le tout est niché dans un local barcelonais à l'adresse tenue secrète - indispensable quand on prétend disrupter le marché ET la législation, tellement vieux monde.
L'opération communication fonctionne à merveille : la polémique générée enfle, et, semble-t-il, les investisseurs flairant le ROI (retour sur investissement) généreux approchent le concepteur.
Cependant, la ruche-témoin est localisée et fermée par les autorités, acclamées par les opposants au projet. Puis tout semble se tasser, et le sujet déserte les médias.
Madrid et l'envers de la ruche
Un an et demi après Barcelone, et alors qu'il prétend avoir créé des ruches à Paris (où on ne s'affole pas plus que ça), Marc Olivé remet le couvert en annonçant l'ouverture à Madrid de pas moins de 10 ruches d'une capacité globale de mille personnes.
Une perspective assez grandiose mais dont on se demande quel lien elle entretient avec le réel (bonne chance pour trouver en ville dix sites susceptibles d'accueillir chacun une moyenne de cent personnes, et de les aménager sans attirer l'attention de personne).
C'est alors que la belle communication se grippe...
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