Rififi en Bolivie

5/13/2009, 7:06:00 PM dans Amérique

Le 17 avril, en direct du sommet de l'Alternative Bolivarienne pour les Amériques, au Venezuela, le président bolivien Evo Morales avait supris en annonçant l'arrestation de plusieurs individus cherchant à les assassiner, lui et son vice-président. Je vais finir par faire un tag sur le mot 'assassiner'. Près d'un mois plus tard, le journal argentin Página 12 complète l'information: des militaires argentins d'extrême droite auraient été recrutés comme instructeurs.

Les médias internationaux étaient restés dubitatifs face à cette dénonciation d'une tentative de magnicide, un mot qu'on n'emploie pas en français. Le Larousse précise même 'autrefois, crime commis contre un haut personnage de l'État'. On les comprend (et on dubitait tout pareil):d'un côté, se débarrasser d'un chef d'Etat qui ne convient pas aux oligarchies traditionnelles, c'est courant en Amérique Latine; de l'autre, des dirigeants populistes qui crient au loup, aussi. Seule l'agence de presse cubaine ne mettait absolument pas en doute la version présidentielle: Prensa Latina a été la seule à parler de 'terroristas' et pas de 'supuestos terroristas'. Voir l'article du Figaro sur le sujet.

Et puis on n'a plus parlé de grand'chose, sauf les représentations diplomatiques des pays dont on a un peu abattu les ressortissants (avant l'assaut, il y avait dans cette 'cellule terroriste': deux Hongrois, deux Roumains - dont un d'origine hongroise -, un Irlandais, trois Croates et deux Boliviens, mais en tout 5 personnes, un malheureux n'avait qu'une nationalité, trois en avaient deux et le record est à trois, vous suivez?) et qui ont protesté véhémentement. Du coup la Bolivie les a accusé de soutenir le terrorisme international et ils ont moins véhémenté. Les Hongrois de France débattent de l'affaire sur le forum Hongrie Forum...

A la réflexion, la personnalité des 5 personnes sus-citées a quand même un peu fait tiquer, particulièrement celle de Eduardo Rózsa Flores, ci-devant feu citoyen boliviano-hongrois-croate (Hongrois par son père, Bolivien par sa mère et Croate par sa guerre), bien connu des gens qui s'y connaissent (on cite notamment dans les milieux autorisés un certain Hubert Bonisseur de la Bath) et de tous ceux qui ont vu le film Chico, dans lequel Rozsa tient son propre rôle de mercenaire. Une chaîne de télévision hongroise en a profité pour ressortir une interview réalisée en septembre 2008, dans laquelle Rozsa expliquait son prochain départ pour la Bolivie, sollicité qu'il était dans la grande province indépendantiste de Santa Cruz, pour former une milice régionale, et gérer le nouvel Etat (comprendre: Santa Cruz) au cas où la 'cohabitation' avec le pouvoir de La Paz s'avèrerait impossible. En gros, permettre la sécession de la plus riche province du pays.

Et donc, on apprend cette semaine que 11 carapintadas - groupes militaires d'extrême-droite auteurs de soulèvements contre le gouvernement argentin, de 1987 à 1990, et amnistiés par Carlos Menem successivement en 1989 et 1990 - se trouveraient dans le département de Beni, au nord de Santa Cruz et également contestataire; et qu'ils auraient été invités par des entrepreneurs et des propriétaires terriens désireux de s'entraîner à l'autodéfense 'ante eventuales intentos de apresamiento por parte de organismos oficiales', c'est tout ce qu'il y a de sérieux: pour déjouer d'éventuelles tentatives d'arrestation de la part d'organismes officiels. Bon, il est vrai que l'ex-préfet de Pando (province voisine de celle de Beni) s'est un peu fait arrêter pour avoir refusé d'appliquer l'état de siège en septembre 2008. Faire respecter le couvre-feu aurait quand même pu éviter la mort d'une trentaine d'Indiens.

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