Le sans-papier, nouveau kleenex en Espagne

8/12/2009, 10:37:00 AM dans Espagne

Deux cas récents tendraient à monter une montée en puissance de la pratique du 'sans papier kleenex' (un 'sin papeles' de usar y tirar: qu'on utilise et qu'on jette) dans la population espagnole: mais c'est qu'il va mourir à son poste de travail, le bougre, ça va m'attirer plein d'ennuis... vite, boutons-le hors de l'entreprise! Le blog Latinos en Alicante se fait l'écho d'une conférence  sur le thème du sans-papiers, 'nouvel objet'.

Les périodes de crises aggravent en général la situation des plus faibles et de ceux qui ont le moins de défense. Les immigrés sont touchés de plein fouet; c'est pire encore s'ils sont sans papiers. Après, on pourra toujours gloser sur le retour de la solidarité... possible, mais pas solidaire de tout le monde.

Fin mai, un Bolivien a eu le bras coupé par une machine à pétrir le pain dans la boulangerie industrielle dans laquelle il travaillait. Ni une ni deux, son patron compatissant l'a chargé dans sa voiture pour le déposer à quelques dizaines de mètres des urgences de l'hôpital, et comme on dit en espagnol, si te he visto no me acuerdo: ni vu ni connu. Et comme il s'est débarrassé du bras dans une poubelle municipale, plus moyen de le regreffer au blessé.

Aujourd'hui, on apprend qu'à la fin juin un autre immigré clandestin, uruguayen, a été sorti du bar dans lequel il réalisait des travaux de rénovation alors qu'il venait d'avoir une crise cardiaque. Eviter les questions, une enquête, un problème en puissance? Qu'allez-vous chercher là! Notre patron charitable, ex-policier national, voulait juste que la malade 'prenne un peu l'air', comme il l'a expliqué à un voisin inquiet. Malgré les appels aux urgences et à la gendarmerie, l'homme n'a pu être sauvé.

Et encore merci d'avoir contribué à l'économie du pays.

NB. D'un point de vue lingüistique, on observe l'apparition de l'expression 'sin papeles', claqué sur le français, j'ai bien l'impression. Elle est encore utilisée entre guillemets mais devient de plus en plus fréquente, au détriment de l'adjectif indocumentado: qui n'a pas de papiers.