La chouette et le footballeur

3/1/2011, 12:17:00 PM dans Amérique

Le scandale de ce début de semaine en Colombie n'est pas un cas de corruption, ni de liens indûs entre politiques et paramilitaires, ni de disparitions inexpliquées. Non, ce qui fait hurler tout un pays aujourd'hui est le mauvais traitement infligé par un joueur de foot à la chouette fétiche de l'équipe adverse.

Dans le stade du Junior Barranquilla, une chouette avait élu domicile. La tradition veut que lorsqu'elle survolait le terrain pendant le match, l'équipe locale l'emportât.

Dimanche, elle a survolé le terrain (et l'équipe locale a gagné) mais elle s'est pris un coup de ballon qui l'a laissée étourdie au sol. Histoire de dégager le terrain, Luis Moreno, joueur panaméen du Deportivo Pereira, l'équipe reçue, lui a balancé un généreux coup de pied qui a indigné d'abord le public - lequel a passé le reste du match à le traiter d'assassin - puis, par la vertu de la diffusion de l'information, tout le pays et probablement un peu au-delà. Voir la vidéo de l'agression.

Moreno a expliqué par la suite 'avoir voulu la faire revoler', 'avoir agi par réflexe', ce qui tendrait à confirmer qu'à force de taper avec sa tête sur une baballe le cerveau s'atrophie.

La chouette n'a pas survécu plus de 36h, entre les traumatismes physiques et les manipulations auxquelles elle a été soumise. Sera-ce une circonstance aggravante pour Moreno, qui a violé la loi 84 de 1989 (Statut National de Protection animale)? Le fait que l'acte ait été commis en public en est déjà une, en vertu de l'article 11: le joueur encourt de 45 jours à 6 mois de prison et une amende de $7.500 à $50.000 (ce qui est ridicule, puisque la première somme équivaut à un déjeuner, et la deuxième à une inscription à l'Association Bogotane d'Ornithologie. Rapporté à un salaire de footballeur, même panaméen...).

Pour ce qui est d'une éventuelle sanction sportive, un spécialiste de l'arbitrage indique que le fait de frapper un animal sur le terrain n'est pas envisagé dans le règlement, mais que cette omission regrettable n'exempte pas pour autant Moreno de ses responsabilités.

On suggère à Luis Moreno une reconversion, un changement de nom et une opération chirurgicale s'il veut continuer à vivre en Colombie.