Micheletti lâche du lest pour mieux sauver son navire

8/19/2009, 6:32:00 PM dans Amérique

Le président de fait du Honduras vient de le reconnaître: exiler son prédécesseur, le président de droit Zelaya, n'était pas approprié. Mais c'est pour mieux insister sur le fait que c'était rigoureusement constitutionnel de le démettre. C'est que si la communauté internationale ne réagit pas franchement, on ne peut pas dire non plus qu'elle accepte le nouveau pouvoir de Tegucigalpa.

Exiler Zelaya était une erreur, et le méchant Dobby qui l'a permis sera sévèrement châtié (je suggère de l'envoyer en pyjama en Antarctique, par exemple). Mais lui, président intérimaire, il a fait tout bien, tout légalement. C'est ce que déclarait Micheletti il y a deux jours, et nous voilà rassurés!

Il est tellement plus blanc que blanc, ce nouveau gouvernement issu d'une lecture de la Constitution qui hélas diffère d'autres (dont les auteurs s'acharnent à parler de coup d'Etat), que depuis qu'il est en place il cherche par tous les moyens à faire arrêter les anciens ministres restés fidèles à Zelaya, en demandant l'aide d'Interpol à longueur de temps (à croire que le fax de la présidence est resté bloqué sur le numéro). Bon, arrêter le président, c'était trop gros, d'autant que tous les pays ibéroaméricains continuent de le recevoir avec les honneurs dus à un chef d'Etat, comme c'était encore le cas au Pérou aujourd'hui (mais comme il n'est jamais bon de mettre tous ses oeufs dans le même panier, au moment où le président déclarait Zelaya 'hôte d'honneur', son ministre des Affaires Etrangères expliquait que la visite avait pour but une réunion de travail et que les honneurs étaient restreints...). Et puis il a encore le pouvoir de nommer les ambassadeurs, ce qu'il vient de faire au Nicaragua, où le représentant hondurien s'était fait porter pâle au lendemain du coup d'Etat. Une mauvaise grippe A H1N1, sans doute...

Donc, Interpol ne peut pas arrêter le président. Mais des ministres? Ca fait moins de bruit, d'arrêter un ministre. C'est plutôt courant, en plus - ça a commencé le jour du coup d'Etat - donc ça attire moins l'attention. On perd l'effet de surprise, l'originalité de la chose. Et puis sur les 3 personnes concernées, y'en a un qui ne l'est même pas, ministre, et deux autres qui ne le sont même plus. D'ailleurs tous trois sont pudiquement appelés 'ex-fonctionnaires' par la presse nationale. Alors? Alors ces dangereux individus auraient gravement mis en danger la nation en ne publiant pas un appel d'offres pour attribuer un marché en rapport avec l'agence nationale de l'électricité. Sur le fond je n'en sais rien, mais ça rappelle un vieux dicton français qui parle de chien, de rage et d'accusations.

Mais le président Micheletti, tout intérimaire qu'il soit (j'adore cette expression), a d'autres chiens à fouetter, même sans la rage. Du haut de ses talonnettes (heu non, il ne doit pas en avoir besoin!), il annonce que le pays est prêt à résister à la pression, et qu'en l'absence des aides internationales il a des réserves de ravitaillement pour 6 mois. Pour parodier Coluche, ils vont être contents, les 80% de pauvres, de savoir qu'ils habitent un pays qui a des réserves de nourriture!