L'Argentine à la chasse au dollar

5/26/2012, 12:00:22 PM dans Amérique

Pour éviter la fuite des capitaux, l'Argentine limite strictement les achats de dollars et leur entrée et sortie du pays. Echaudés par la crise de 2001, et alors que l'inflation réelle tourne autour de 25% par an, les habitants cherchent à se procurer des billets verts et à les mettre à l'abri... loin des banques.

Les billets qu'achètent les Argentins ne sont d'ailleurs pas tant verts que bleus. Dolar blue est le nom du dollar "parallèle", celui qu'on trouve au marché noir - dans les cuevas, les grottes - et qui s'échange actuellement contre six pesos. Car l'achat du dollar "officiel" est devenu terriblement compliqué depuis octobre dernier. Face à une fuite des capitaux estimée à plus de vingt-et-un milliards de dollars en 2011, soit une augmentation de 88% par rapport à l'année précédente, les autorités argentines ont instauré un contrôle sévère. L'achat de dollars n'est autorisé qu'en fonction des ressources connues et selon des critères assez obscurs, qui donnent lieu à de nombreux refus. Depuis une quinzaine de jours, le taux d'acceptation a encore baissé, sans justification.

Or les Argentins, qui ne font plus confiance à leur monnaie depuis 2001, cherchent à acheter des dollars pour préserver leur épargne de l'inflation galopante. Ils se tournent donc vers le marché noir, très florissant tant à Buenos Aires que dans les provinces frontalières. On parle de dix millions de dollars de transactions quotidiennes...

Alors on contrôle aussi les frontières. Les nationaux ne peuvent quitter l'Argentine qu'avec dix mille dollars maximum, et sous réserve de les déclarer, faute de quoi s'ils sont découverts ils seront saisis. La gendarmerie, les douanes et l'AFIP (Administration fédérale des Revenus Publics) multiplient les contrôles dans le pays et à ses frontières. Des chiens policiers spécialement dressés détectent les billets que des citoyens peu scrupuleux souhaiteraient conserver pour eux; ce qui démontre au passage la fausseté de l'adage qui veut que l'argent n'ait pas d'odeur.

Mais se procurer légalement des dollars à l'étranger devient compliqué aussi. Désormais, retirer des dollars à un distributeur automatique - il est courant de pouvoir choisir entre un retrait en monnaie nationale et un retrait en dollars dans plusieurs pays d'Amérique Latine - n'est possible que pour les Argentins disposant d'un compte national abondé en dollars, et non en pesos argentins.

Alors que la grogne gagne la population de classe moyenne, qui considère que c'est toujours le lampiste qui prend, le dollar bleu n'en finit pas de s'envoler, à l'instar de l'oiseau bleu qui survole la terre (désolée, le double effet Eurovision).