Assange trouvera-t-il asile en Equateur?

6/21/2012, 7:19:05 AM dans Amérique

Le fondateur de Wikileaks a trouvé refuge à l'ambassade d'Equateur à Londres, où il a demandé l'asile politique. C'est le seul recours qui pourrait lui éviter l'extradition vers la Suède, d'où il craint d'être renvoyé vers les Etats-Unis dont Wikileaks a publié de nombreux câbles diplomatiques. Il est malgré tout peu probable qu'Assange puisse parvenir à bon port.

Ceci tout d'abord parce qu'en se rendant à l'ambassade d'Equateur, Assange a violé les conditions de sa liberté sous caution. La police peut donc l'interpeller dès qu'il mettra le pied hors de l'ambassade. Autrement dit, si l'Equateur accordait l'asile à Assange, il faudrait qu'un avion décolle directement de l'ambassade. Pas vraiment envisageable.

Mais pourquoi donc l'Equateur? C'est vrai après tout, ça aurait pu être Cuba aussi. Par exemple. Le président équatorien Rafael Correa se moque d'être ami ou pas avec les Etats-Unis, et saurait donc résister à leur - éventuelle - amicale pression. Et puis ils se connaissent, puisqu'Assange avait interviewé Correa pour le compte de Russia Today au mois d'avril. Surtout, le président de l'Equateur a adopté une attitude plus amicale envers Assange. Dans un premier temps, fin 2010, il avait repris son ministre des Affaires Etrangères pour avoir proposé la résidence à Assange. Mais un peu plus tard il considérait que la diffusion des câbles avait été plutôt une bonne chose pour son pays, car elle prouvait le caractère impérialiste de la politique des Etats-Unis. Et en avril 2012, il acceptait donc d'être interviewé par Assange.

Cette affaire est finalement assez positive pour Correa. Bien des gens ont dû découvrir l'existence, voire la localisation de l'Equateur, grâce à elle, et ce quelle que soit la décision finale prise par le pays sur la demande d'asile. Le président a déclaré qu'elle serait prise en toute souveraineté, qu'il fallait étudier la demande de près, et déterminer si Assange était en danger de mort. Cet élément fait référence à l'argumentation d'Assange, qui soutient que les actes commis contre la législation états-unienne pourrait lui valoir la peine de mort. Tant qu'à faire une demande d'asile politique pour persécution, autant en faire des tonnes. Le petit pays andin sera donc très attentif à la façon dont les poursuites ont été menées contre Assange et s'assurera que les droits de la défense ont été respectés.

L'autre énorme avantage de cette affaire pour Correa, c'est qu'il est régulièrement dénoncé par l'opposition et certains organismes de journalistes pour son traitement des médias, un peu à la hussarde, il faut bien dire. La demande d'Assange lui permet de se gausser de ses détracteurs: un journaliste qui a publié des documents secrets demandant l'asile à un pays accusé de pratiquer la censure journalistique, quelle aubaine!

Pour sa part, Assange gagne un peu de temps. On n'imagine guère qu'il puisse rester très longtemps dans la légation, mais après tout il y a des précédents: Mel Zelaya est bien resté plusieurs mois dans l'ambassade du Brésil à Tegucigalpa, et avec soixante autres personnes, en prime. Une bien belle opération de communication gagnant-gagnant, en tout cas.